Entretien avec Maitre MIGNARD, Avocat au Barreau de TOULON / Docteur en Droit


Entretien avec Maitre MIGNARD, Avocat au Barreau de TOULON / Docteur en Droit

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Article N°27971

Entretien avec Maitre MIGNARD, Avocat au Barreau de TOULON / Docteur en Droit

Dans un contexte économique en perpétuelle évolution, les chefs d'entreprises se trouvent confrontés à des défis juridiques sans précédent. Afin d'apporter des éclairages essentiels sur la prévention et la gestion des difficultés entrepreneuriales, j'ai eu le privilège d'interroger Maître Cédric MIGNARD, avocat spécialisé en droit des affaires et expert en procédures collectives. Sa vaste expérience et son expertise approfondie en font un guide précieux pour comprendre les tendances actuelles, les stratégies préventives, et les clés de réussite pendant les procédures judiciaires. Dans cette entrevue, Maître MIGNARD partage des conseils avisés destinés aux entrepreneurs, offrant ainsi un aperçu essentiel pour les dirigeants de clubs d'affaires et autres acteurs du monde des affaires. Plongeons dans les perspectives éclairantes de cet expert, et découvrons comment anticiper, naviguer et surmonter les obstacles juridiques dans le monde des affaires.

VB : Pouvez-vous présenter votre parcours professionnel et votre expertise en droit des affaires?
CM : Je suis titulaire Master II "Droit des Contentieux" ainsi que d'un Master II "Droit de la Banque et des Procédures Collectives.
J’ai soutenu ma Thèse de Doctorat intitulée "Le crédit-bailleur mobilier face à la procédure collective du crédit-preneur".
J’ai eu l’opportunité de démarrer ma carrière professionnelle en rejoignant un groupe bancaire régional spécialisé en leasing au sein duquel j’étais en charge des entreprises en défaut de paiement.
J’ai ensuite intégré l'Assurance Garantie des Salaires, qui est l’organisme de protection des salariés dont les employeurs sont confrontés à des procédures collectives.
J’ai ensuite embrassé la profession d’Avocat, tout d’abord au Barreau de Marseille avant d’intégrer le Barreau de Toulon."

VB : Quelles sont les tendances que vous observez actuellement en matière de difficultés juridiques auxquelles font face les entrepreneurs ?
CM : Depuis le 1er janvier 2023 le nombre d’ouverture de procédures collectives (qu’elle soit de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire) est en hausse de plus de 30% par rapport à l’année précédente. Depuis le début de l’année 43.740 procédures ont été ouvertes.
Sources Observatoire économique CNAJMJ – Novembre 2023


AVANT LES DIFFICULTÉS

VB  : Quel sont, selon vous, les signes avant-coureurs que les entrepreneurs devraient surveiller pour anticiper les difficultés ?
CM : Il est difficile de répondre à cette question car il est nécessaire de faire une appréciation au cas par cas, mais certains éléments tels que la perte d'un client important et/ou une diminution marquée du volume d'affaires doit conduire à anticiper les difficultés qui peuvent en résulter.

VB : Quelles stratégies juridiques préventives recommandez-vous aux entrepreneurs pour minimiser les risques ?
CM :Plusieurs procédures préventives ont été instituées telles que le mandat ad hoc et la conciliation, qui se révèlent très efficaces pour aider les entreprises qui connaissent des difficultés sans se trouver en état de cessation des paiements.
Le législateur de 2005 a instauré, en outre, la procédure de sauvegarde qui permet aux entreprises in bonis d'avoir recours à une procédure de traitement judiciaire des difficultés.


PENDANT LES PROCÉDURES JUDICIAIRES

VB : Pourriez-vous expliquer les étapes clés d’une procédure collective
CM : La procédure de sauvegarde et le redressement judiciaire démarrent par ce que l’on appelle une « période d’observation ». Elle dure six mois, renouvelable une fois par décision motivée. Elle a pour objet et pour effet de placer l’entreprise sous la protection de la justice, notamment en interdisant aux créanciers de poursuivre le débiteur, et permettre une poursuite d’activité dans les meilleures conditions.
Elle permet également d’évaluer les capacités de l’entreprise à se redresser afin de préparer un plan de sauvegarde ou de redressement qui soit cohérent avec ses capacités de financement.

VB : Quels sont les défis juridiques les plus fréquemment rencontrés par les entrepreneurs pendant ces procédures ?
CM : La consultation des créanciers est de principe dans toutes les procédures. La principale difficulté est de faire converger l’ensemble des volontés vers la sauvegarde de l’entreprise et éviter la disparition d’une entité économique. La nécessité d’un vote approbatif par les classes contraint toutes les parties à négocier le contenu du plan pour s’assurer d’un accord réciproque.


TENDANCES ÉMERGENTES ET ÉVOLUTIONS

VB :  Y a-t-il des tendances émergentes dans le domaine du droit des affaires en lien avec les difficultés entrepreneuriales ?
CM : Jusqu’à présent on parlait de droit des procédures collectives de manière générale ou de droit des faillites. Cette terminologie a évolué et désormais en emploi l’expression de droit des entreprises en difficulté.
Cette modification qui pourrait paraître purement formelle reflète, en réalité une évolution très importante de la matière qui n’a plus vocation à simplement s’orienter vers le désintéressement des créanciers mais devient un ensemble de règles destinées à prévenir et traiter les défaillances des entreprises.

VB : Comment le paysage juridique évolue-t-il pour mieux accompagner les entrepreneurs pendant ces périodes délicates ?
CM : La philosophie l’ensemble des réformes entreprises en la matière est de faciliter, par une meilleure connaissance de la situation financière de l'entreprise, l'adoption précoce de mesures efficaces de redressement.

VB : Le meilleur conseil pour les entrepreuneurs ?
CM : La seule erreur courante est la consultation tardive d’un Conseil, alors qu’il n’est plus possible d’apurer le passif au moyen d’un plan cohérent. Surtout, même lorsque la procédure collective est ouverte, encore trop de chefs d’entreprises hésitent à consulter alors même que l’Avocat peut avoir un rôle déterminant tant sur le sort de l’entreprise que sur celui du dirigeant.


CONCLUSION 
 
L'entretien avec Maître Cédric MIGNARD souligne l'urgence pour les chefs d'entreprise de prendre des mesures préventives face aux tendances croissantes des procédures collectives. Son expertise met en avant l'importance des stratégies juridiques préventives telles que le mandat ad hoc et la conciliation. Pendant les procédures judiciaires, la nécessité d'une consultation anticipée est soulignée, car la convergence des intérêts des créanciers reste un défi majeur. L'évolution vers le "droit des entreprises en difficulté" met en lumière une approche plus préventive du paysage juridique. En tant que présidente de clubs d'affaires, ces conseils précieux peuvent aider nos membres à anticiper et à surmonter les défis, renforçant ainsi la résilience de leurs entreprises. Nous remercions Maître MIGNARD pour ses conseils éclairés et son engagement envers le succès des entrepreneurs.

Vanessa BOISSIN

Lien :https://www.cedric-mignard-avocat.fr/

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